pop-rock
Justin Nozuka
Interview
Ce qui frappe en premier chez Justin Nozuka, c’est sa maturité. Des chansons sur l’amour, le désamour, l’espoir, le désespoir, la vie et la mort, interprétées de façon bouleversante par une voix à tomber par terre, celle d’un chanteur tout juste sorti de l’école.
Imagine que tu es quelqu’un d’autre, tu viens de découvrir ce fantastique artiste qu’est Justin Nozuka, et tu veux parler de sa musique à un ami. Comment la décrirais-tu ?
Comment me décrirais-je ?
Oui. A ton meilleur ami par exemple?
Ah c’est une question difficile. Je dirais surement que la musique a des influences R&B, au niveau des mélodies, mais aussi des influences blues. Beaucoup d’acoustique, surtout pour cet album. Il écrit ses propres chansons.
L’un des points qui fait toute la beauté de ton album « Holly » est qu’il est très épuré. Tout ou presque repose sur ta voix et ta guitare. C’était un choix ou c’était par manque de moyens ?
C’est vrai qu’on a fait l’album avec très peu de moyens. Moi-même et Bill Bell l’avons produit, c’était notre vision.
La plupart de l’album a été enregistré en live, on faisait 4 prises de chaque chanson, acoustique et vocale. On choisissait la meilleure. Et on la produisait. C’est pour ça que l’album est spécial, c’était un moment unique à chaque fois. Production minimale. Il y a certaines chansons qu’on a faites avec un groupe derrière.
Et à l’avenir tu envisages de conserver ce type d’orchestration ou bien tu vas partir vers des productions avec des violons par exemple ?
Oui je travaille avec un groupe maintenant. Ils seront sur l’album, on travaille sur des maquettes en ce moment même. Il y aura plus de production, et ça crée une vibe et un univers différent pour les chansons. Et nous pensons à y intégrer des violons peut être.
Holly, c’est le nom de ta maman… Elle te prend une part des royalties ?
Oh non !!
Sérieusement, elle a produit une partie de ce disque, c’est ça ?
Oui en effet.
Appeler l’album par son prénom c’était une façon de la remercier pour ça, et peut-être pour le reste ?
Oui. Pour moi, ça a été une décision très facile à prendre, les dix premières secondes où je réfléchissais à un nom d’album. Elle a soutenu cet album, et puis c’est ma mère, c’est elle qui m’a mis au monde, sans elle, je ne serais pas là. Et c’est mon premier album, donc ça tombait sous le sens de l’appeler ainsi.
Tu as 20 ans, tu es jeune, et tu l’étais encore plus lorsque tu as débuté. Tu n’as jamais été tenté par les télé-crochets très à la mode en France, les émissions comme la Nouvelle Star, la Star Academy ? Ce genre d’émissions existe au Canada ?
Oui, mais ça ne m’a jamais tenté, parce que même lorsqu’on gagne dans ces émissions, on ne peut pas écrire ces propres chansons. On est un peu prisonniers des contrats qu’ils vous font signer. On est à la merci des maisons de disques, et moi je souhaitais avoir plus de contrôle, et pouvoir faire les choses à ma façon, écrire mes chansons, pouvoir faire ce que je veux avec ma carrière.
Le clip After tonight, ton single, est plein de références adolescentes, les jeunes autour du feu de bois par exemple. Il n’empêche que tout le monde relève l’étonnante maturité de tes compositions, de ta voix, à tel point que tu dois en avoir marre qu’on te le fasse remarquer ! As-tu une idée d’où te vient cette maturité ? De ton éducation musicale ? De tes origines métissées ?
Je pense que tout ce qui m’arrive aujourd’hui vient de mon environnement familial. Ça m’a aidé, j’ai une grande famille, donc j’apprends beaucoup d’eux, notamment au sujet des rapports humains. Ma famille est géniale, ils me soutiennent vraiment. Et cela fait longtemps que j’écris de la musique, il y avait une période où je ne chantais que des chansons d’amour à propos des filles, j’écoutais de la pop. Puis Jack Johnson est devenu connu au Canada et aux US, et en France aussi d’ailleurs non ? Puis Ben Harper qui a été une influence pour moi pendant longtemps, et j’ai commencé à aimer la musique de Johnny Mitchell. J’ai commencé à être attiré par des artistes un peu plus authentiques qui écrivaient eux mêmes leurs chanson et y mettaient leur âme, contrairement aux artistes qui ne sont qu’un visage. Donc j’ai su dès mon plus jeune âge que je voulais écrire mes chansons. Je voulais que ma musique soit créative et artistique, car ce sont les choses qui sont importantes pour moi. J’essaye vraiment de faire de la bonne musique !
Tu viens d’une famille d’artistes. Ton frère fait du RnB, ta tante est actrice, et son mari, ton oncle, est l’acteur Kevin Bacon. Que pense-t-il de ta musique ? Il est fan ?
En fait on n’est pas trop en contact, je ne sais pas trop ce qu’il fait. Mais j’ai une grande famille des deux côtés, donc c’est dur de rester en contact avec tout le monde. Et du côté de ma mère, tout le monde est artiste, le frère de ma mère est le musicien Mike Stern, un joueur de guitare jazz incroyable, et je lui parle souvent. C’est bien d’avoir autant d’artistes dans sa famille car on a un vrai soutien. Et j’apprends tellement d’eux.
Et collaborer avec tes frères, penses-tu que vous pouvez être les prochains Jonas Brothers ?
Non, jamais les Jonas Brothers ! Ca n’est pas du tout ce qu’on a envie de faire avec la musique ou avec l’art. Tous dans ma famille veulent faire de la qualité et se surpasser. Et on se bat tous pour une révolution dans le monde artistique mainstream.
D’ailleurs tu endosses un peu une attitude d’acteur lorsque tu composes. Tu as raconté que tu aimes te mettre dans la position d’un autre pour l’écriture de tes textes, comme dans Save him, où tu es le voisin d’un couple dans lequel la femme est battue. C’est un jeu schizophrène, mais est-ce vraiment un jeu ?
Oui, pour moi c’est excitant de pouvoir faire ça. C’est créatif, et ça m’intéresse de pouvoir changer de perspective, me mettre à la place de quelqu’un d’autre. Dans Down in a cold dirty well, je m’imagine au fond d’un puits sale et dégoutant, avec de l’eau jusqu’aux genoux, et je me dis que je vais mourir au fond de ce puits. Donc j’essaye de ressentir ce que je ressentirais vraiment si je n’allais jamais sortir de ce puits et y mourir, ou si je n’allais plus jamais revoir le soleil ou la lune par exemple. Et c’était assez trippant comme expérience car j’y étais vraiment, je l’ai vraiment ressenti, et c’était assez incroyable.
Tu es déjà venu en France il y a quelques mois, notamment pour l’émission de télé Taratata. C’était un super show. Qu’est ce qui te plaît dans notre pays ?
Il y a tellement de choses que j’aime en France. Taratata est une émission qui tourne vraiment autour de la musique et des artistes, ça met vraiment en scène ce côté artistique et les performances des artistes. Ça donne aux artistes l’occasion de montrer leur musique. Et en faisant des live en France, j’ai ressenti beaucoup de respect, et j’ai l’impression que les gens me comprennent, et comprennent ce que j’essaye de faire. Dans certains endroits, lorsque je chante, les gens continuent à parler pendant ma prestation, et ça je ne comprends pas ! Mais en France, on m’écoute vraiment lors de mes shows et je ressens vraiment de la chaleur.
J’ai un ami, qui s’appelle Justin, et qui n’est pas beau du tout. Tu sais qu’à cause des Justin comme toi, ou Justin Timberlake, c’est très dur de s’appeler Justin quand on n’est pas beau ? C’est peut-être l’occasion de t’excuser auprès de tous les Justin moches de la planète !
Oh non !! C’est assez marrant de voir la perception de la beauté qu’ont les gens. Je pense que chaque personne est belle, et a de belles qualités. Ce qui compte ça n’est pas ce qui se voit à l’extérieur, mais ce que vous faites de votre vie.
En France on t’avait vu reprendre Ain’t no sunshine de Bill Withers lors de Taratata. Tu aime faire des covers ? Tu en feras sur scène lors de tes concerts français en avril ?
Oui, enfin le mois d’avril est loin donc je ne suis sûr de rien, mais je pense qu’on fera un cover de Grandma’s hands de Bill Withers aussi. C’est une chanson à propos de sa grand-mère que j’aime beaucoup. C’est une de mes chansons préférées, on l’a déjà faite plusieurs fois sur scène. Ou on en fera un autre, je ne sais pas trop.
Tu pourrais chanter du Ben Harper sur scène ?
Oui, j’aime beaucoup Ben Harper donc pourquoi pas.