Scène française
Interview Didier Barbelivien
Interview Didier Barbelivien
Didier Barbelivien est de retour avec un nouvel album baptisé « Atelier d’Artistes », l’occasion pour Zikeo.net d’interviewer cet auteur-compositeur-interprète de talent.
Pourquoi avoir fait ce nouvel album? Il y a des chansons et un DVD à l’intérieur. Pourquoi avoir décidé d’enregistrer ces chansons ?
Ça s’est fait comme beaucoup de choses dans ma vie, sur un coup de hasard. J’étais sur scène depuis 2 ans et demi, alors qu’avant je n’avais jamais fait de scène. La question de mon répertoire s’est posée. J’avais 6 ou 7 chansons connues du public, et ça ne suffit pas pour faire un tour de chant. Pendant une tournée de Julio Iglesias, il y a trois ans, dans le sud, je chantais souvent avec lui le soir, pour l’aider à se rappeler les chansons en français. Il m’a dit : « Pourquoi tu ne chantes pas ? Tu as du succès auprès du public alors pourquoi tu ne vas pas sur scène ? ». Je lui ai dit que je n’avais pas assez de chansons. Il me dit : « que tu es idiot, tu as écrit plein de tubes pour les autres, alors pourquoi tu ne les rechanterais pas ?« . J’ai monté un tour de chant, à partir de ces chansons. Comme le public me demandait à chaque fin de concert pourquoi elles n’existaient pas sur disque, on l’a fait. C’est aussi simple que ça.
Est-ce que quand on est auteur, on ne se sent pas un peu dépossédé de ses textes ? On a aussi envie de les chanter ?
C’est ce qui m’a séduit dans cette entreprise, j’ai l’impression de reprendre les chansons des autres. C’est ça qui est très agréable. Je me vois très mal faire un album de reprises en reprenant mes chansons à moi. Alors qu’en reprenant les chansons que j’ai écrites pour les autres, pour moi je chantais du Johnny Hallyday, du Christophe, du Hervé Vilard… C’est marrant.
Comment marche un Didier Barbelivien ? Deux fois sur trois, c’est un tube. Où trouve-t-on l’inspiration ?
Ce n’est pas 2 fois sur 3, sinon je serais classé dans le Guinness des records. C’est beaucoup moins que ça. Mon inspiration vient de ce que j’observe, des idées qui me viennent dans la rue, des situations, des choses que je peux lire à travers un livre, un article de journal. Je ne prends pas de note, ça reste dans un coin de ma tête. Régulièrement je m’enferme, je me conditionne pour écrire des chansons. Je m’enferme, je me mets au piano, à la guitare, et ça vient ou pas. Si ça ne vient pas, je retourne dans la rue.
A ce propos, j’aimerais que vous me racontiez l’anecdote pour Elle m’oublie.
De temps en temps, je parle d’une anecdote que je relève dans un journal. En l’occurrence, c’était il y a bien longtemps, il y a 30 ans, dans Télé 7 jours. Il y avait une petite rubrique « Si vous avez manqué le début », dans laquelle ils racontaient le début du film. Je lis les 5-6 lignes, et ça raconte presque le début de Elle m’oublie, la fille qui descend d’un autocar, qui part et qui laisse le type. J’ai écrit la chanson pratiquement d’un coup, sur un cahier. Puis je la pose, je l’oublie. Je me suis promis de voir le film le soir pour affiner la chanson. Je n’ai pas vu le film, un copain m’a appelé pour diner et j’ai compétemment oublié de voir le film. Le truc est resté comme ça pendant des mois. Un jour, en la jouant comme ça à un éditeur, il me dit que c’est une chanson qu’on devrait montrer à Johnny Hallyday. Finalement, j’ai fait la maquette. C’est une longue histoire, ça a duré pendant 3 ou 4 mois, et finalement il l’a faite.
Sur cet album il y a énormément de succès.
Il y a aussi des choses moins connues.
Dans Atelier d’artistes, si on reprend un peu les paroles, il y a des choses assez marrantes : « une machine à écrire, des magnétophones, et pour les souvenirs un électrophone ». C’est chez vous ?
C’est chez moi. La preuve, il y a le décor. Je voulais pour cet album de reprises, créer comme un spectacle audio. On entre sur Atelier d’artistes, où j’explique un peu le décor dans lequel je fais les chansons et la manière dont je fais les chansons. Après, il y a toutes les chansons que j’ai écrites. Je finis sur un truc qui s’appelle Seule la solitude, qui raconte un peu la vie de l’artiste quand le rideau se referme.
J’ai un grand souvenir avec Michèle. Vous avez des anecdotes avec Le Normand ? Vous entretenez toujours des relations avec lui ?
Toujours. Je le connais depuis 34 ans. Je le vois toujours, Gérard.
Et pour Michèle, vous avez une anecdote particulière sur la création de cette chanson ?
Je l’ai écrite au lycée, c’était un peu ma vie de l’époque, sauf qu’à l’époque, j’avais nommé la chanson Marcelle, au lieu de Michèle. Je me disais qu’il y avait peut être de très jolies filles qui s’appellent Marcelle, et on n’en parle jamais. La maison de disque a trouvé ça un peu trop original, et elle a dit que ça s’appellera Michèle.
Pour Hervé Vilard, il y a Méditerranéenne, et je crois qu’il y a une belle anecdote ?
C’est une reprise d’un tube de Cutugno, qui s’appelle l’Italiano. Un jour, Hervé me dit qu’il faut adapter ça. J’ai adapté beaucoup de chansons avec Hervé Vilard, on adorait faire des adaptations tous les deux. Il passe à la maison, on écoute la chanson. A part le fait que je trouvais la musique populaire, je me demandais ce qu’on allait raconter sur ce truc là. Je ne parle pas italien, j’essayer de comprendre ce que disait Cutugno. On ne voulait pas faire un truc sur l’Italie, puisque ni Hervé ni moi n’étions Italiens. On a cherché longtemps. Il y a des idées qui viennent vite et d’autres qui prennent leur temps. Ce soir là, on ne trouvait pas. A un moment, j’ai dit à Hervé : « Qu’est-ce que Tino Rossi aurait fait s’il avait chanté quelque chose comme ça ?« . Il aurait parlé du sud, de la Méditerranée. Hervé me dit : « Non. Méditerranéenne« . On est parti là dessus.
Il y a aussi une chanson magnifique, Petite fille du soleil. Une rencontre avec une icône, Christophe.
A l’époque ce n’était pas une icône. C’est un chanteur que j’adore depuis le début. J’avais adoré Aline, les Marionnettes, J’ai entendu la mer… J’adorais les chansons de Christophe à l’époque, et aujourd’hui encore. C’est une rencontre magique. Ce qui m’a toujours excité et motivé dans mon métier, c’était de rencontrer les mecs dont j’achetais les disques quatre ans avant. La première fois que j’ai rencontré Claude François, c’était phénoménal pour moi. J’avais acheté tous ses disques quand j’avais entre 8 et 12 ans. Un jour on m’a dit que j’allais rencontrer Claude François et écrire des chansons pour lui. C’était la même chose pour Christophe. Ça c’est fait assez facilement, sauf qu’il m’avait filé une cassette qu’il fallait vraiment décrypter. C’est un mec qui chante avec la voix à l’intérieur de l’orchestre. On y est arrivé quand même.
En vous écoutant, on a l’impression d’une vraie humilité. Vous avez essaimé des chansons chez les plus grands. Vous avez autant de bonheur à raconter que vous avez fait une chanson pour Claude François, Johnny…
J’étais très jeune quand j’ai commencé dans ce métier. L’humilité c’est quand même la marque de fabrique des auteurs. On ne sait jamais si ça va fonctionner ou pas. Il ne faut pas se dire : « J’ai écrit ça, l’artiste va l’enregistrer« . J’étais toujours très heureux de ces rencontres, je les admirais quand j’étais gosse. La première fois que j’ai rencontré Johnny Hallyday, c’était bien après qu’il ait enregistré Elle m’oublie. Je travaillais dans mon coin, au départ. Je ne connaissais pas tous ces gens là. Ça passait par les éditeurs, ils envoyaient mes chansons et les artistes les enregistraient. Très souvent, je ne connaissais pas les artistes.
Vous avez toujours autant d’émerveillement quand il s’agit de signer une chanson pour l’un ou l’autre ?
Oui. Ça reste miraculeux. Ce qui me fait toujours bizarre, c’est de l’entendre pour la première fois à la télé ou à la radio. Je me dis: « C’est moi qui ai fait ça« . Ça plait ou ça ne plait pas. Ça reste toujours la même aventure pour moi.
L’aventure va continuer ?
J’espère. Je continue d’écrire.
Je vous pose cette question parce que dans le DVD que les spectateurs vont découvrir, vous dites qu’au delà d’un certain âge, vous arrêterez de chanter ?
J’arrête de chanter dans 5 ans, j’aurais atteint pour moi la limite physique et vocale. Sans être le plus grand chanteur du monde, quand je suis sur scène, je chante les chansons dans les tonalités d’origine, et ça reste assez haut. Chaque soir, quand je chante « Elle m’oublie », je me demande combien d’années je vais être capable de faire ça. Je n’irais pas au-delà, je ne me vois pas gratouiller les chansons en ayant changé les tonalités. Je n’ai pas envie de le faire à moitié, parce que j’ai la prétention de le faire pleinement. Je n’ai pas envie de les faire au rabais. Je pense qu’à 60 balais, j’aurai la voix un peu fatiguée.
Sur cet album il y a également une jeune femme ?
Tatiana Platon. Elle fait partie de la magie des rencontres que j’ai eu la chance de faire dans ma vie. Ça tient de la légende mais c’est la vérité. J’ai rencontré des gens par hasard et j’ai fait des choses avec eux, sur le gaz. Tatiana passait au studio, je voulais l’essayer dans des chœurs. Je voulais changer de choristes, sinon c’est toujours le même son. Elle a commencé par faire des voix derrière moi. Petit à petit, je me suis demandé pourquoi je n’adaptais pas certaines chansons en duo avec elle. Je l’ai fait pour Quand je t’aime, Le sunlights des tropiques, Méditerranéenne, où elle fait tout un sketch en italien.