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Scène française

Entrevue avec Arthur H

Arthur H se livre sur Zikeo

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Entrevue avec Arthur H 4

Mu par un désir impératif de liberté, Arthur H a largué les amarres, monté sa propre boîte de production et d’édition, changé de musiciens, confirmant sa réputation d’ovni musical.

Tu viens de sortir ton nouvel album « Baba Love ». Normalement la plupart des artistes découvrent leurs albums en studio, pourtant pour toi cela s’est fait dans un lieu différent !
La première fois qu’on a écouté le mastering finit, avec Derya, c’était dans un club londonien après la fermeture. Un vieux sound systeme de rock totalement décédé depuis longtemps, le son était atroce mais on était heureux.

Tu viens de prononcer le nom de Derya, qui est-ce ?
Derya Uzun était l’ingénieur du son en chef, c’est le roc sur lequel repose ce disque. On travaille ensemble depuis des années mais pour la scène uniquement ; on a eu très envie d’aller plus loin ensemble. Je n’ai jamais vu un homme aussi concentré aussi longtemps.

Pour en revenir à ton nouvel opus, il n’a pas été conçu d’une manière très conventionnelle ? Si je te dis accident et scooter tu penses à quoi ?
Une nuit de novembre un taxi africain m’a fait une queue de poisson boulevard Voltaire. Mon scooter percuta sa portière arrière et je chût. Monscaphïde fût felé. J’ai dû annuler le concert du lendemain au Royal Festival Hall de Londres. J’ai donc composé les musiques de ce disque avec les cinq doigts de la main droite plus le majeur et l’auriculaire de la main gauche. Malgré le mystère des septs doigts, « Baba Love » n’est pas un disque manouche. Paix à mon fidèle scout, paix au taxi black et que le grand Scafoïde bénisse Django.

Sur « Baba Love » il y a un duo avec Jean Louis Trintignant ! Comment s’est fait cette rencontre ?
J’ai rencontré Jean Louis lors d’un spectacle sur Boris Vian auquel nous participions, une amitié, une curiosité pour l’autre est né. Pour moi Jean Louis est juste un grand musicien, controle parfait du timbre, de l’intention, du rythme, de l’improvisation, de la mélodie ; une sobriété magique au service de la sensualité du son, autant d’experience que d’innocence, un amour des mots, de leur mystère, de leur légèreté. Je suis très fier d’avoir écrit L’Ivresse des hauteurs pour lui.

Il y a un autre invité surprise sur ton album, c’est Saul Williams ?
J’ai croisé Saul dans un studio parisien et ça a tout de suite bien marché entre nous. Je suis depuis toujours fan de hip-hop et je voulais une vois américaine sur « Baba Love ». Saul Williams était parfait, grand poète, voix puissante, groove et élégance et de plus, fin connaisseur de l’oeuvre de Basquiat. Je lui ai envoyé les musiques et des bouts de textes pour qu’il écrive les paroles de son côté. A l’heure H, il est arrivé au studio, ponctuel, et il m’a dit : « Arthur tu peux me faire écouter la musique, ça parle de quoi tes chansons ?« . Il n’avait rien écrit, rien préparé. Ce qui a donné lieu à une très légère panique passagère. J’ai joué les morceaux. Il a écouté, très concentré, a sorti un petit carnet, s’est roulé un joint léger et a commencé à écrire. Puis il a chanté les quatre premier vers, ça l’a inspiré, il a repris son carnet et en une heure le texte était fini.

C’était pareil pour la seconde chanson ?
Idem pour la deuxième chanson ! Saul me fait penser à Brigitte Fontaine, il ne doute pas de son inspiration et cette confiance est très efficace. Saul Williams est un être magique.

« Baba Love » c’est aussi un album familial puisqu’on y trouve ta soeur Izia !
J’ai la chance d’avoir deux soeurs chanteuses très talentueuses, Maya Barsony, à qui j’ai emprunté le vers Laisse couler dans Give me up et Izia Higelin, le volcan sonore. Izia m’avait invité avec Joey Starr à chanter avec elle pour son Olympia. C’est émouvant pour nous de chanter ensemble et on s’était promis de recommencer. En plus je voulais secrètement la faire chanter en français. L’arrangement de la Beauté de l’Amour fût un pénible labyrinthe ; pour des raisons obscures, je me suis cassé la tête dessus. On a perdu une semaine de studio et plombé sérieusement le budget du disque avant de trouver, par miracle et au dernier moment, une couleur et une structure satisfaisante. On a posé nos voix à Paris, la chanson s’est éclairée. Izia est une jeune artiste pleine de lumière, de force, quand on la côtoie on s’aperçoit qu’elle a un potentiel vocal inouï. Pour moi c’est seulement le début de notre collaboration artistique.

Tu es chanteur mais ce que les gens savent moins s’est que tu es aussi éditeur et producteur !
Effectivement, avec Richard Gamba mon manager copilote, on a décidé de monter une boite d’édition et de production : Mystic Rumba. Aujourd’hui dans la musique les grosses stars et les grosses maisons de disques s’en sortent très bien. Les espaces par où la musique se diffuse vivent une période magique, une abondance merveilleuse ; le système le permettant évidemment, ils ne partagent pas un koppec avec le monde de la création, rien ne les y oblige. Du coup les artistes du milieu continuent à mettre toute leur vie dans leur art mais sans plus en attendre un retour normal des choses. Ce n’est pas forcément injuste et ce n’est pas la faute des gens, du public : c’est l’ADN structurel des nouvelles technologies . L’informatique est une révolution importante et toutes révolution doit détruire avant de construire, c’est un processus naturel. Alors comme beaucoup d’autres, je commence à récupérer les fruits de mon oeuvre, attendant le soutien et la sympathie de ceux qui apprécient cette musique. Ce qui compte c’est de tenir le coup dans la tourmente, de se préparer intelligemment à un futur incertain.

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