Scène française
Maxime Le Forestier en interview
Maxime Le Forestier en interview
Qu’a t’il fait durant ces huit années qui le séparent de « L’écho des étoiles » (2000) ? Actuellement en tournée dans toute la France, Maxime Le Forestier nous répond et nous parle de son dernier album, de sa tournée, et de ses collaborations.
« L’écho des étoiles » sort en 2000 si je me souviens bien. Après j’ai fait deux ans de tournée avec trois guitaristes Jean-Félix, Manu Galvin et Michel Aumont. On a fait plus de 200 concerts. Après j’ai été approché par Elie Chouraqui pour écrire des chansons pour un spectacle musical qui s’appelle « Gladiateurs ». Ça m’a pris deux ans. Il y avait vingt cinq chansons à faire. C’était passionnant. Ça n’a pas marché comme les producteurs le voulaient mais je suis content de l’avoir fait. Après ça, je voulais finir l’enregistrement de mon intégrale Brassens. On avait enregistré la moitié à la fin des années 90. J’avais l’autre moitié de son oeuvre à enregistrer. Je crois qu’il restait quatre-vingt cinq chansons. Je voulais les enregistrer en public. J’ai donc fait encore 270 concerts. Deux ans. Si tôt finie cette dernière tournée Brassens, j’avais réalisé ce que je voulais réaliser, je me suis mis à écrire l’album. Ça ne m’a pris qu’un an.
La chanson titre, qui donne son nom à l’album, « Restons amants », a une histoire très particulière avec Julien Clerc. Est-ce que vous pouvez nous raconter ça ?
Julien et moi, ça fait très longtemps qu’on se connaît et qu’on écrit des chansons ensemble de temps en temps. Je suis très honoré de faire partie de son équipe de paroliers. Il y a quand même de jolis noms. Avec Julien, on s’est beaucoup vu en 2007. On était à Paris tous les deux, on n’habitait pas trop loin l’un de l’autre. On s’est vu et on a fait pas mal de chansons ensemble, dont « Restons amants ». Les chansons avec Julien ça peut se passer de deux façons différentes. Soit je lui fais lire un texte et il le met en musique, soit il me fait entendre une musique et je mets un texte dessus. On a expérimenté les deux. Là c’est un texte que j’avais écrit. Je lui ai envoyé un texto. Ça fonctionne comme ça, il ne répond pas au téléphone puisque c’est une star. Je lui ai envoyé un texto en lui disant « J’ai un texte pour toi, pour moi, je ne sais pas ». Il arrive. Il lit le texte. Il me dit « C’est bien ça« . Et il s’en va sans dire au revoir. Il m’appelle deux heures plus tard en me disant « ça y est, j’ai fait la musique. Je te préviens c’est inchantable. Ça ne fait rien, je la garderai pour moi« . Là ça a fait tilt, je me suis précipité chez lui pour écouter. Pour moi, c’est inchantable dans le ton où il la chante, puisqu’il a une voix plus haute que moi. Je lui ai fait tout baisser et c’est chantable par un mec normal. C’est ce que je lui ai envoyé en texto. « On la transpose en Si mineur et c’est chantable par un mec normal« .
Résultat ?
Résultat, moi je l’ai enregistré. Lui il l’a enregistré sur son album qui sort à la rentrée. Je n’ai pas encore entendu sa version, plus lente paraît-il et évidemment plus haute. Donc voilà une chanson qui est née sous une bonne étoile puisqu’avoir deux enregistrements la même année, c’est rare.
Vous avez dit que vous connaissez Julien Clerc depuis très longtemps. Je crois que c’est Léo Ferré qui avait insisté pour que vous vous rencontriez ?
Vous êtes connus, reconnus même, pour vos chansons contestataires. Avec « Restons amants », vous sortez un peu de ce registre.
Il y a quelques années que la chanson contestataire n’est plus obligatoire sur mes albums. C’est une décision. Je ne voulais pas que « contestataire » soit un métier. Est ce que Né quelque part est une chanson contestataire ? Je ne sais pas. Mais même dans mon premier album, c’est vrai qu’il y avait Le Parachutiste, mais il y avait aussi Education Sentimentale, Mon Frère… J’ai toujours essayé d’écrire ce qui me chantait et de chanter ce qui me passait par la tête. Quelque fois on est amoureux, quelque fois on lit le journal.
Quand vous jouez Brassens pendant trois ans je crois…
En tout oui.
Est-ce qu’il y a une influence sur votre façon de composer les nouvelles chansons ?
Non, ça a une influence sur la façon de les réaliser mais pas de les composer. Vous savez, je chante Brassens depuis que j’ai quatorze ans donc ça fait partie de moi. Ce sont ces chansons là qui m’ont fait découvrir la chanson, la guitare. Il y a longtemps que j’ai réglé mes problèmes de filiation ou de liaison avec l’écriture de Brassens. En revanche, pour cet album là, je me suis souvenu d’un conseil de Brassens qui m’avait dit : « Pour juger si une chanson est bonne, tu te lèves à la fin d’un repas et tu chantes la chanson juste en tapant le rythme sur la table. Si tu arrives à les émouvoir comme ça, après l’arrangement ce n’est pas important ». Alors je n’ai pas été aussi radical. Mais je me suis dit que je ne parlerais pas à un musicien accompagnateur tant que je n’aurais pas mes douze chansons qui sonnent avec une guitare et une voix. J’ai rajouté un peu d’harmonie. C’est dans ce sens que peut-être Brassens m’aura influencé, plus que dans la façon d’écrire. Parce qu’on n’est pas de la même génération, de la même culture. La mythologie est très présente chez Brassens, Cupidon… Moi je n’utilise jamais ce genre de références. Il y a quand même des différences très importantes.
Il y a une artiste sur votre album, Emmanuelle Béart, dans un très beau duo qui s’appelle Hymne à la soie. Vous pouvez nous raconter comment vous avez réussi à la convaincre de passer derrière le micro ? C’est une chanson qui existe depuis un petit moment je crois.
Comment va se composer le nouveau spectacle ? Est-ce que ça sera surtout les nouvelles chansons ? Est-ce que vous allez les mélanger avec l’ancien répertoire ?
Ça se passe toujours de la même manière. Au départ, je mets toutes les nouvelles chansons, sauf Hymne à la soie parce que si Emmanuelle n’est pas là ça n’a pas de sens. Il y a donc onze nouvelles chansons. Le reste ce sont des anciennes, plus quelques petites surprises. Et si je m’aperçois au fil des premiers concerts qu’il y a des chansons du nouvel album qui n’intéressent pas les gens, je les jette. C’est comme ça que la sélection se fait. Ça se fait dans la première semaine. On les déplace, une fois qu’une chanson a fait trois places et qu’à chaque fois il y a eu Clap Clap et les gens attendent… On se dit « Celle là ce n’est pas pour aujourd’hui« . Elle reviendra peut-être plus tard. Ou elle mourra.
Y a-t-il des villes que vous attendez plus particulièrement ? Des espèces de rendez-vous où à chaque fois que vous y allez c’est un plaisir ?
Non, l’histoire public du nord, public du sud, je n’y crois pas du tout.
Vous avez quand même une relation très particulière avec la Corse, parce que je crois que vous démarrez de la Corse ?
Oui, toujours. Erbalunga, les pauvres, ce sont eux qui profitent de mes expériences. J’avais démarré Brassens chez eux, j’avais démarré « Plutôt guitare » chez eux aussi. J’aime bien cet endroit, c’est mon village. C’est Roger Caratini qui dit « On n’est pas Corse, on est d’un village Corse ». Ce village là m’a adopté. Je n’ai pas de maison là-bas, je squatte chez l’un chez l’autre ou je loue. Mais j’y suis heureux. Ce sont des goûteurs de chansons. J’aime bien avoir leur avis.
Label : Polydor
Crédits photos : D.R