Scène française
Les Fatals Picards Le sens de la gravité
Les Fatals Picards – Le sens de la gravité
A l’occasion de la sortie du nouvel album des Fatals Picards, Zikeo vous offre une mise en bouche du dernier opus du groupe, sorti le 2 mars dernier et sobrement intitulé « Le sens de la gravité ».
A l’origine du Combat ordinaire, le titre qui ouvre l’album, il y a bien sûr la bande dessinée de Manu Larcenet à laquelle elle emprunte son titre ainsi que quelques références textuelles. Ici, point de trentenaire, ni de chat, ni d’ancien de l’Algérie, ni même de jolie vétérinaire, mais simplement un homme dont l’usine est sur le point de fermer et qui n’a pour lui que son caractère trempé dans l’acier et son envie de retourner au charbon et pour qui la grève est souvent le dernier baroud d’honneur avant l’oubli…et le combat ordinaire de devenir celui d’une vie entière pour celui qui ne veut pas finir sa vie comme le « héros » de Canal Saint-Martin victime d’un ascenseur social soumis aux lois de la gravité…
Après avoir rendu un vibrant hommage à Lady Diana sur la chanson du même nom, et donné une vision pleine d’ambiguïté – à l’image de ce pays qui ne cesse de nous fasciner par la diversité des courants humains qui le traverse et de cette Amérique post-Bush dans Ma baraque aux Bahamas, les Fatals Picards tirent sur les quelques amis qui leur restaient encore dans le monde.
Pour preuve ce Princes du Parc, inspiré par les évènements d’un certain 29 mars 2008, quelques minutes avant le match opposant le P.S.G. au Racing Club de Lens. Un match dont l’originalité ne viendra, encore une fois, pas des joueurs mais des supporters issus pour la plupart du Kop of Boulogne, toujours à la pointe en matière d’intelligence et de sobriété.
Avec la chanson Chinese Democracy, qui est un clin d’œil au groupe Guns n’ Roses, les Fatals Picards posent la question du rapport entre sport et politique et de l’envie qu’ils avaient de témoigner de l’étrange sensation qu’ils ont eue l’été dernier en voyant sur les écrans du monde entier, les plus grands sportifs chausser leurs survêtements et leurs œillères, pour aller décrocher, au nom de l’esprit du sport d’un Pierre de Coubertin définitivement mort et enterré, des médailles dans un pays qui n’est pas près de gagner les Championnats du Monde des Droits de l’Homme.
Pour la petite histoire, c’est après avoir vu un numéro de Graffiti (série concoctée par Pierre Lescure et Dominique Besnehard) que le groupe a eu l’idée de C’est l’histoire d’une meuf. Eddy Mitchell se livrait, avec l’intelligence et l’humour qu’on lui connaît, à un petit règlement de comptes entre lui et certains de ses amis du monde du spectacle, et plus particulièrement celles et ceux qui, au fil des années, avaient pris le plateau des Enfoirés pour un outil promotionnel vital au bon déroulement de leur carrière… d’où l’idée d’imaginer, sans la nommer, le personnage de cette fille prête à tout pour réussir à grappiller quelques secondes d’antenne .
Dans le Jardin, il y avait pour les Fatals Picards une double volonté. Tout d’abord celle d’écrire un texte dont le sens ne se révèle qu’à la fin du morceau : si l’envie de finir sa vie en coulant des jours paisibles dans le jardin d’un pavillon de banlieue reste un rêve encore à la portée du travailleur français moyen, le sans-papiers peut parfois, lui aussi, réussir à finir sa vie dans le jardin d’un pavillon de banlieue. Ensuite, celle d’évoquer un fait divers sordide, malheureusement pas unique, avec un humour qui est parfois la politesse du désespoir.
Ce disque est aussi l’occasion pour nos quatre sosies de Bernard Lavilliers de revisiter deux morceaux issus de leur précédent album : Mon père était tellement de gauche et Seul et Célibataire, offrant ici une relecture plus proche de ce que le groupe est sur scène.