Scène française
Nouvelle Vague
Interview
A l’occasion de la sortie du nouvel album de Nouvelle Vague, « NV3 », Zikeo s’est entretenu avec les membres du groupe.
Il y a eu une grande nouveauté dans le choix des titres. Il y a eu des intervenants, des auteurs compositeurs concernés par ces titres. Comment ça s’est passé ?
On savait depuis le début de Nouvelle Vague que Nouvelle Vague était plutôt appréciée par les groupes punks ou post punks et new wave que l’on a repris. Cela nous a fait plaisir, parce qu’au départ on n’avait pas de plan de carrière, et on n’avait pas réfléchi au fait que les groupes originaux puissent entendre nos versions. Il valait mieux ne pas y penser ! Petit à petit on a eu des échos, un article où Martin Gore parlait de Nouvelle Vague… Lorsque Marc a eu l’idée d’aller plus loin et d’entrer en contact avec certaines personnes de la new wave, on a franchit le pas. Ça a été assez simple, on a envoyé des mails au management ou aux gens qu’on avait rencontrés, par exemple le chanteur des Specials, qu’on a rencontré à Londres. C’était assez facile de lui dire « Vu que tu as bien aimé ce qu’on a fait avec tes chansons, est-ce tu veux participer au nouvel album ? ». Finalement, ils ont joué le jeu, à part Martin Gore qui était en enregistrement avec Depeche Mode à New York et qui n’a pas pu venir. Ils sont tous venus au studio à Paris, enregistrer leur partie. On leur a proposé des duos. C’est un peu curieux de demander à quelqu’un de rechanter sa chanson 20 ans plus tard dans un arrangement différent. Donc on leur a demandé de faire un duo avec une des chanteuses de Nouvelle Vague, ce qui a aidé à leur faire accepter le projet. Effectivement, on leur a envoyé avant la maquette du titre.
Quelles ont été les réactions de la plupart de ces interprètes auteurs compositeurs ?
On s’est rendu compte qu’ils nous connaissaient tous. L’échange était tout de suite positif et chaleureux, même le management nous disait qu’ils adoraient ce que l’on fait. Les échanges se sont fait dans une bonne atmosphère, il fallait juste trouver la façon dont on allait travailler. Comme le disait Marc, proposer des idées, un duo, mais ne pas trop fermer les pistes. On n’a pas dit « tu chantes là ou là ». Tous les artistes nous ont demandé des tuyaux, des idées de ce qu’ils pourraient faire sur nos versions. Pour quelqu’un qui a écrit la version originale 25 an plus tôt, ce n’est pas facile de chanter une reprise de sa propre chanson, qui ne sonne plus du tout comme l’originale, avec en plus une chanteuse à côté. Ils nous ont demandé des indices et nous on savait plutôt bien ce qu’on voulait. On a aussi essayé d’avoir des idées. On a demandé à Martin Gore, puisqu’on savait que c’est lui qui avait écrit le morceau. On a essayé d’être un peu malin et d’intéresser les gens en leur rendant hommage.
Pour certains ça va être une découverte. Autant sur Depeche Mode il y a des gros tubes, mais vous essayez de mettre en avant des titres qui ont marché en Angleterre, un peu moins en France. Vous avez fait une sélection de morceaux évidents et d’autres qui le sont moins.
Je pense que Master and servant était un gros tube un peu partout, mais moins diffusé depuis un certain temps. Je pense que ça reste un morceau bien connu des fans de Depeche Mode. All my colours de Echo and the Bunnymen est un morceau en voie d’être oublié. Il était sur le deuxième album de Echo and the Bunnymen. C’est un de mes titres préférés de Echo and the Bunnymen de tous les temps. C’est une aubaine de reprendre un titre pareil parce que les gens ne le connaissent pas. Ils vont pouvoir le découvrir. Ça fait parti du projet. On s’est rendu compte sur le premier album que les titres que les gens aiment le plus sont les titres que les gens ne connaissaient pas avant. Par exemple, In the manner of speaking, sur le premier album, qui est à la base un morceau de Tuxedomoon n’est vraiment pas connu. Ce morceau a été repris dans plein de films, sur des séries télé. Les gens attendent ce morceau quand on le joue en concert. J’ai remarqué que pour « Heart of glass » de Blondie, qui est un méga tube, on n’a pas la même attente des gens. Les gens ne viennent pas pour écouter des tubes mais pour découvrir des choses qu’ils ne connaissent pas. On s’est rendu compte qu’ils ne savaient même pas qu’on faisait des reprises ! Ça nous perturbe toujours un peu mais une partie du public ne sait pas qu’on fait des reprises. Ils ne connaissent pas les morceaux. Une reprise à la base est une chanson qu’on connait. Nous on reprend des morceaux que personne ne connait, c’est un peu spécial. Dance with me sur le deuxième album, je pense que très peu de gens se souviennent de Lords of the New Church. En France, les Lords avaient une petite chapelle de public mais aux Etats Unis ils étaient complètements inconnus. Quand on joue Dance with me, dont notre version est devenue un morceau très apprécié pour pas mal de gens, on a repris un groupe inconnu pour nombre d’anglo-saxons et une chanson encore moins connue.
Prenons l’exemple Soft Cell, Tainted Love, c’est le titre qui les a révélé au public.
En même temps, ce n’est pas un titre à eux, c’est une reprise. Donc vous faites connaitre un vrai titre de Soft Cell. C’est ça qui est drôle. Quand on était jeune, on ne savait pas que Tainted love était une reprise. On s’est rendu compte après, je m’intéresse beaucoup à ce système de reprise, que pas mal de groupe ska comme Madness ont fait des reprises. C’était un clin d’oeil de prendre un morceau écrit par Soft Cell, qui est un magnifique morceau Say hello wave goodbye.
Comme vous voyagez de par le monde et que Nouvelle Vague répand ses reprises, les gens se disent que c’est un groupe à part entière. Ces titres là, vous vous les êtes accaparez. Il y a des réactions comme ça ?
C’est un peu notre destin. Il y a des gens qui s’identifient totalement à la version Nouvelle Vague. Il y a plein de gens qui voient Nouvelle Vague comme un bon groupe français. Il y a beaucoup de ça. Hier et avant-hier, on a joué à New Castle et à Manchester devant 4000 personnes. Ils ne savent pas qui est Nouvelle Vague, on joue des morceaux qu’ils ne connaissent pas vraiment ; ils prennent ça comme un groupe indé un peu étrange, français, avec des filles qui chantent. C’est ce qui fait en sorte qu’on a accédé à cette crédibilité et à cette notoriété. On n’a pas arrêté de tourner depuis 2004.
Est-ce que pour la direction musicale de cet album vous avez tenu à vous mettre dans un schéma relativement tenu, avec du bluegrass ?
Pas toujours. C’était une des nouvelles couleurs que l’on voulait dans l’album. On en a besoin, c’est ce qui nous inspire et nous excite au moment d’enregistrer. La bossa nova, on en a fait le tour sur le premier album, on a bien approfondi le sujet. Si on ne fait que des reprises en bossa nova, on s’ennuie un peu. Les gens s’ennuieraient aussi. Il fallait trouver un autre son. C’est la grande chance qu’on a sur ce projet, ça nous permet nous d’explorer toutes ces influences qu’on a, qui peuvent aller du jazz à la chanson française, la pop 60S, et de mettre ça dans l’album. Maintenant, il faut essayer d’avoir une direction générale. On a plutôt dit que c’était le country et le bluegrass, mais pour les gens qui écouteront l’album, il y a plein de morceaux qui n’ont rien à voir avec ça. Il y avait aussi la nécessité de recentrer sur une musique un peu plus nord américaine, ce qui est le cas sur certains titres. C’était une façon de créer un bon costume pour nos invités. Je ne suis pas sûr que Martin Gore aurait été très confortable à chanter de la bossa nova. Comme on préparait notre idée de duo, l’idée de faire des reprises un peu moins décalées dans le sud s’est imposée. C’est une musique qu’ils peuvent chanter plus facilement.
Nouvelle Vague est le premier projet que j’ai fait pour lequel j’ai fait un deuxième album ! Je n’ai jamais dépassé le deuxième album non plus ! C’est quelque chose qui nous dépasse complètement. On a fait le premier, on n’était pas sûr de faire un deuxième ; on a fait le deuxième, on n’était pas sûr d’en faire un troisième. On a communiqué sur le fait que ça serait certainement le dernier et finalement, on se demande pourquoi. Comme c’est une très bonne idée à la base, une idée très ouverte, on est contraint d’avoir de nouvelles idées. Il y a toujours quelque chose qu’on peut amener. En tout cas, on peut aller plus loin. On a vraiment mis le doigt sur quelque chose en créant ces voyages spatiotemporels. Un truc s’est passé, et même si les gens ne savant pas vraiment ce qui se passe. On a un public très jeune aujourd’hui, qui est sensible à ces chansons, ces textes qui ont été écrits par des hommes dans les années 70, qui sont chantées aujourd’hui par des jeunes filles. Il y a un décalage qui intéresse les gens. Je pense que le terreau des chansons issues de la new wave et du punk est aussi dans les textes et les thèmes abordés, c’est une peinture du monde occidental qui n’a pas forcément bougé depuis. Le vendredi soir, tout le monde va se bourrer la gueule, partout dans tous les pays. Ces chansons sont d’actualité par les sujets qu’elles abordent, y compris la mélancolie, la monotonie de la vie. « Too drunk to fuck », ça marchera toujours. On donne un autre costume au matériel de base mais il y quelque chose qui intéresse les gens à la base, y compris les jeunes.
Un troisième album, à suivre sur scène aussi.
Carrément. On va faire pas mal de festivals cet été. On va commencer une tournée européenne en septembre-octobre. Il faut qu’on aille partout, c’est tout un périple. Et on va retourner aux Etats-Unis en décembre, puis on fera l’Afrique, l’Asie, l’Australie en 2010. On en a pour deux ans à mon avis. On ne s’est jamais arrêté de tourner, il n’y a pas de raison qu’on fasse des interruptions maintenant.
Label : Pias